À l’occasion de la sortie du numéro 69 de Nouvelle École consacré à Péguy et à Bernanos, Alain de Benoist a été interrogé par la revue éléments.
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ÉLÉMENTS : Pourquoi Péguy et Bernanos ? Qu’est-ce qui les rend si indissociables ? Leur christianisme bien sûr, mais enfin ils n’en ont pas le monopole, loin de là. Quoi d’autre ?
ALAIN de BENOIST. Le fait est qu’ils sont souvent cités conjointement par ceux qui s’en réclament, et ce n’est évidemment parce qu’ils étaient tous les deux chrétiens, nominalement au moins (car il y a beaucoup à dire sur les particularités de leurs fois respectives). Ils étaient pourtant à bien des égards très différents. Mais leur point commun est d’avoir été l’un et l’autre des critiques radicaux de la modernité. Ce sont des antimodernes, avec toutes les ambiguïtés qui s’attachent à ce terme. Et chez eux, la critique de la modernité prend avant tout la forme d’une formidable indignation. Je sais bien ce qu’il peut y avoir d’insatisfaisant dans ce terme : quand Stéphane Hessel disait « Indignez-vous ! », son propos était un peu ridicule, car on ne s’indigne pas sur commande. Chez Bernanos comme chez Péguy, l’indignation est authentique parce qu’elle vient de l’intérieur. C’est leur conscience, corps et âme mêlés, qui s’indigne de ce qu’ils ont sous les yeux. Ils s’indignent de voir ce qui est au sens propre in-digne prendre le dessus dans « la marée de merde du monde moderne », pour parler comme François Sureau. Et cette indignation est bien sûr indissociable d’une critique du règne de l’argent, qui n’épargne rien ni personne – à commencer par les « chrétiens de pain d’épice » qui se sont ralliés aux valeurs bourgeoises.
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